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Nicolas Delhomel, animateur social : « Les jeunes font aussi de belles choses pour leur quartier »

Animateur social au centre Saint-Elivet Annie Peigné de Lannion, Nicolas Delhomel explique son travail d’accompagnement de jeunes gens dont l’investissement dans le quartier d’Ar Santé-Les Fontaines peut faire changer les regards que l’on porte sur eux.

Dans les différents témoignages qu’Ancrages a pu recueillir, les travailleurs sociaux se sentent « délaissés » par les pouvoirs publics, notamment en étant exclus du Ségur de la Santé. Comment cela se manifeste-t-il pour vous ?

Cela va faire dix ans que je suis travailleur social dans le quartier d’Ar Santé-Les Fontaines, dix ans à rencontrer et parler avec les habitants. Il m’a fallu du temps pour me faire une place. Certes, il peut y avoir un manque de reconnaissance de la part de certains habitants : quand on déambule dans le quartier, ils peuvent penser qu’on se balade, qu’on n’est pas au travail… Je comprends également qu’il y a un manque de reconnaissance de notre métier, notamment pour le salaire. Mais on ne travaille pas pour avoir un salaire énorme, on le fait surtout parce qu’on est passionné. J’ai travaillé pendant le confinement et je ne l’ai pas fait pour avoir une prime… même si cela aurait été bien, je ne dis pas le contraire !

Parlons citoyenneté : la campagne présidentielle qui approche occupe-t-elle une place dans votre travail ?

Bien sûr, si une personne me dit « j’aimerais m’inscrire sur les listes électorales » je peux la diriger vers les services de la mairie. Mais on n’évoque pas vraiment la politique avec les habitants, notre principe est de rester neutre. On parle quand même un peu plus de politique depuis qu’il y a la guerre entre la Russie et l’Ukraine mais généralement on va discuter de la vie dans le quartier, des loisirs … Notre métier est de rassurer les gens, de les écouter et pourquoi pas débattre mais on ne prend jamais parti.

Vous menez des projets de construction de mobilier urbain avec les jeunes d’Ar Santé-Les Fontaines, ces chantiers leur permettent-ils de se sentir plus « citoyens » justement ?

Je m’occupe des « chantiers jeunes » (des chantiers qui répondent à des besoins des habitants et faits par des jeunes, NDLR) avec la mairie et Côtes d’Armor Habitat, le bailleur. Dans les journaux, on voit principalement du négatif sur le quartier. Vu de l’extérieur, on peut penser que c’est “un peu le bordel” mais ce n’est pas forcément vrai. Les jeunes font aussi de belles choses pour leur quartier : ils contribuent à la vie de leur quartier en créant des objets et des meubles urbains comme des bancs ou des rampes d’accès. On fait deux ou trois chantiers par an. Les habitants portent un regard différent sur les jeunes du quartier. Ils ne vont pas se dire « les jeunes ont fait des conneries », mais « ce sont des jeunes qui font des choses pour le quartier ». D’autant que les chantiers se déroulent pendant les vacances, les jeunes pourraient très bien ne rien faire mais ils préfèrent contribuer aux chantiers éducatifs. Leur engagement est valorisé par le travail de construction, il s’agit d’une démarche très intéressante pour eux.