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Logement social, un triangle quinquagénaire autour du centre ville

Des ingénieurs en télécommunication aux personnes les plus précaires, les trois quartiers de logements sociaux de Lannion ont évolué au fil des arrivées d’entreprises dans la ville.

Depuis 1959 et les premières constructions de logements sociaux, Ker-Uhel, Pen Ar Ru et Ar Santé Les Fontaines forment un triangle autour de Lannion. Dès 1966, des immeubles de logements sociaux ont vu le jour dans le quartier de Ker-Uhel. Cette première partie de quartier a été complétée, en 1971, par la partie haute du boulevard d’Armor et le quartier des Fontaines. La décentralisation du CNET (Centre national d’études des télécommunications) à Lannion en 1960 a entraîné une explosion des demandes de logements dans la ville, les quartiers d’habitat social devaient donc répondre à cette demande. La population en grande majorité composée de cadres supérieurs et d’ingénieurs jusqu’aux années 1980 s’est progressivement diversifiée. “Il y a eu un filtrage de la population et le niveau social s’est abaissé dans ces quartiers”, explique Jean-Jacques Monnier, historien spécialiste de la Bretagne. “Les cadres supérieurs ont utilisé ces logements comme une étape de passage, le temps d’acheter ou de faire construire leur propre logement.”

Le quartier de Ker-Uhel est le seul qui répond à une dynamique nationale de développement des zones à urbaniser en priorité, les ZUP, qui, en 1959 vise à créer des logements dans des zones encore peu habitées pour répondre à la demande croissante. S’il s’est surtout développé avant les années 80, le parc locatif social continue à s’étendre avec la construction par Terre d’Armor Habitat, le bailleur social de la ville, de cinq pavillons et quatorze appartements dans le centre-ville en 2018 et 2019. 

À Ker-Uhel, les bâtiments aux façades blanches qui bordent le boulevard d’Armor ont eu le droit à des travaux de rénovation entre juin 2019 et mai 2021. Ce projet, piloté par le bailleur social Côtes d’Armor Habitat, a été accompagné de travaux sur l’espace public engagés par la municipalité. Le nouveau collège et un terrain de sport ont par exemple vu le jour. Mais tous les quartiers de logements sociaux n’ont pas eu cette chance.  Malgré les travaux d’isolation thermique du bailleur social, certains habitants ne se sentent pas logés dans de bonnes conditions. Devant le tabac du quartier, un jeune critique ces travaux. « Ils n’ont quasiment rien ajouté comme isolation extérieure, on ne voit pas la différence chez nous.”

Les quartiers des Fontaines et de Pen Ar Ru n’ont pas eu la chance de bénéficier de travaux de rénovation récemment. “On a dans l’idée de rénover Les Fontaines mais c’est une idée, il n’y a rien qui est fait”, explique Anaïs Alasseur, chargée de mission développement local à la mairie de Lannion.

La concentration des logements sociaux à Lannion et en périphérie proche se voit d’autant plus quand on prend un peu de hauteur.  La moitié du parc locatif social de la communauté d’agglomération se trouve à Lannion. Le reste est réparti dans des proportions bien moindres sur l’ensemble du territoire. Si l’article 55 de la loi de solidarité et renouvellement urbain (SRU), qui impose un minimum de 20 ou 25% de logements sociaux en fonction de la situation du territoire dans les communes de plus de 3500 habitants, est respecté à Lannion, ce n’est pas le cas dans toutes les communes de l’agglo. Avec respectivement 4 012 et 7 288 habitants, Pleumeur-Bodou et Perros-Guirec, par exemple, ne respectent pas le quota. En 2019 le parc locatif social des deux villes balnéaires représentait 7,64% et 9,64% du nombre d’habitations total, bien en deçà des 20% attendus.